Résumé :
Au cours des
dernières années, le crowdfunding est devenu une source considérable de
financement pour les entrepreneurs qui cherchent un financement externe par la
foule via la plateforme Internet. Même s’il semble difficile de dater sa genèse,
le crowdfunding n’est pas considéré comme une nouvelle innovation financière ou
un phénomène nouveau, mais ce qui le différencie des anciennes formules et son
explosion dans sa version actuelle c’est l’utilisation du web comme socle phare
de son développement. En effet, les analyses empiriques existantes signalent un
engouement très impressionnant des fonds collectés via le crowdfunding dans le
monde entier. Celui-ci permet aux entrepreneurs de lever des fonds par le biais
d'un appel ouvert sur Internet.
Ainsi, à partir
d’une idée et pour monter un projet on n’a plus besoin de bailleurs financiers
traditionnels, de plus en plus réticents surtout en période de crise.
D’ailleurs, ce mode de financement qui prend de l'ampleur au fil des années
reste le principal concurrent des banques d’aujourd'hui. Le crowdfunding a
permis d'inciter les promoteurs d'idées et ainsi de libérer la créativité de
chaque individu à l’échelle du globe, ce qui a permis la mise en marche de
divers projets sans pour autant avoir le consentement des banques qui demandent
des garanties souvent inconcevables, avec des taux d’intérêts excessifs. Néanmoins,
aujourd'hui, avec le crowdfunding et ses différentes plateformes spéculatives
et non spéculatives, on assiste à une activité qui a trait à l'économie réelle
tout en créant de nouvelles perspectives de création et de développement des
activités socioéconomiques. Cette nouvelle formule de financement via Internet
qui a connu un essor considérable dans le contexte des pays développés
notamment aux Etats Unies d’Amériques, le Canada, la Grande Bretagne, la France
et la Suisse a -t- elles les conditions nécessaires de réussite dans le
contexte d’un pays en développement tel le Maroc ?
Pour répondre à
cette question, nous examinons dans un premier temps la notion et les formes du
crowdfunding, pour ensuite présenter le cas des deux plateformes
marocaines de crowdfunding (atadamone.com et smala & co) pour ensuite
présenter et analyser les facteurs déterminants de sa réussite et/ou de son
échec dans le contexte du Maroc, pays où la finance informelle et surtout la
microfinance institutionnelle font leurs preuves.
INTRODUCTION
Au cours des
dernières années, le crowdfunding est devenu une source considérable de
financement pour les entrepreneurs qui cherchent un financement externe. Même
s’il semble difficile de le dater, le crowdfunding n’est pas considéré comme un
phénomène nouveau. Mais ce qui différencie les anciennes initiatives et son
explosion dans sa version actuelle est l’utilisation du web comme socle phare
de son développement. En effet, les analyses empiriques existantes signalent un
engouement très impressionnant des fonds collectés via le crowdfunding dans le
monde entier. Celui-ci permet aux entrepreneurs de lever des fonds par le biais
d'un appel ouvert sur Internet. L’une de ses caractéristiques les plus
importantes constitue les avantages privés supplémentaires dont les bailleurs
de fonds (par exemple, «crowdfunders») bénéficient en participant au mécanisme
de crowdfunding. Ces avantages privés supplémentaires varient avec les formes
de crowdfunding, allant d'un modèle à base d'actions, régime de participation
aux bénéfices, et prêts à des dons purs et simples. Bien que le crowdfunding puisse
prendre différentes formes, sa notion reste ambigüe en termes de compréhension
théorique des facteurs économiques qui déterminent le choix d'un entrepreneur
d'une forme particulière de crowdfunding.
Principale
alternative aux circuits de financement traditionnels souvent trop longs et
bureaucratiques, diverses plateformes de crowdfunding sont aujourd’hui
présentes dans plusieurs pays dans le monde. Face à l’importance de ce
phénomène, certaines juridictions se sont même dotées d’un cadre législatif
régulateur. Ainsi, la France s’est dotée en 2014 d'une
législation encadrant l'activité de « crowfunding ». Cette même année
a vu la fixation par l’Italie du cadre légal de cette activité. Aussi, d’autre
pays tels que l’Espagne et le Royaume-Unis se sont dotés d’un cadre réglementaire
régissant cette activité. Au Maroc, bien qu’à ce jour on dénombre deux principales
plateformes de crowdfunding, cette activité n’est pas encore dotée d’un cadre
réglementaire.
Dans ce cadre, l’objectif
principal de ce travail est double, d’une part, il s’agit de présenter les
divers concepts liés au crowdfunding ainsi que les plateformes à l’origine de
sa propagation. D’autre part, on va étudier les déterminants et les
spécificités du crowdfunding dans le contexte Marocain.
1.
CADRE CONCEPTUEL
Pour traiter du
crowdfunding au Maroc, il est d’ordre crucial de s’attarder sur des rappels
conceptuels des différents concepts en relation avec ce nouveau mode de
financement. Il s’agit d’expliquer la crowdfunding ainsi que ses formes.
1.1 LE CONCEPT
DU CROWDFUNDING
Le crowdfunding…
Un mot qui n’est pas évident à comprendre... Si l’on le traduit au sens étymologique
du terme, il devient « financement participatif ou collaboratif».
Comme première impression, et au sens littéraire, le crowdfunding représente
« le financement par la foule ». Avec l’avènement très considérable
de ce phénomène, plusieurs auteurs ont tenté de le définir. Cependant compte
tenu de son aspect très vaste, il serait primordial de stipuler que le
crowdfunding couvre de nombreuses disciplines. Ce qui lui confère une puissance
très consistante au niveau du globe. Dans un contexte d’entreprise, la
définition suivante tient compte d’un ensemble de spécificités en intégrant les
divers acteurs au sein de l’organisation : « Le crowdfunding se réfère aux efforts déployés par les individus et par
les groupes d’entrepreneurs (culturels, sociaux, et à but lucratif) pour
financer leurs projets en faisant appel à des petites contribution d’un nombre
relativement important de personnes qui utilisent Internet, sans norme
financière intermédiaire. ».
En 2010, Schwienbacher et Larralde apportent d’autant plus une autre définition
encore plus élargie, qui initie en quelque sortes les mécanismes du
crowdfunding : « Le crowdfunding est un appel ouvert, essentiellement à travers
Internet, pour la fourniture de ressources financières, soit sous forme de dons
ou en échange d'une certaine forme de récompense et / ou des droits de vote, en
vue de soutenir des initiatives à des fins spécifiques ». Cette définition, tout aussi récente qu’elle
est, la plus prise en considération dans les travaux des chercheurs en la
matière. Ceci dit, et si l’on s’approfondi davantage dans ce phénomène, le
crowdfunding obéit à un certain fonctionnement qui lui est propre, via des
plateformes qui procèdent à mettre le lien entre les pourvoyeurs de fonds,
constitué principalement des porteurs de projets et des bailleurs de fonds que
représentent les internautes.
1.2 PLATEFORMES
DU CROWDFUNDING
Selon la classification de Vincent Ricordereau (2013),
qui est le co-fondateur de l’une des plateformes les plus connues à l’échelle
mondiale « kisskissbanbank », le crowdfunding peut être segmenté
selon deux grandes familles : les plateformes non spéculatives et que les
plateformes spéculatives.
1.2.1 Plateformes non spéculatives :
Elles fonctionnent à travers trois grands modèles,
chacun ayant ses propres spécificités comparativement à la nature du projet à
financer.
Le créateur du
projet, que ce soit un individuel ou un institutionnel, demande la
participation du public sous forme de dons pour financer son initiative. Il
détient la part de marché la plus importante et est l’un des principaux acteurs
de la croissance du crowdfunding. C’est un modèle adopté naturellement par
l’ensemble des initiatives philanthropiques telles que les associations, les
entités caritatives… Il permet de proposer une variété de projets dont 62%
d’entre eux ont été financés en 2012. Il a progressé de 45% en 2012 par rapport
à 2011 totalisant : 979 millions $, avec un montant moyen des campagnes de
collectes lancées de 1400$. Les plateformes les plus notables à ce sujet
sont : Razoo (Etats-Unis d’Amérique), Justgiving (Grande Bretagne), United
Donations (France).
- Le
don moyennant des contreparties en nature :
Au courant de ce
modèle, les créateurs de projets font toujours appel aux dons, mais ils
motivent leurs donateurs à l’aide de contreparties en nature liées au projet.
C’est la catégorie qui a la préférence des médias et suscite davantage
l’intérêt des individus que des associations. Ils permettent notamment à tous
les secteurs culturels et artistiques de financer des milliers de projets
(films, concerts, expositions, design, reportages, documentaires, livres,
jeux…). En 2012, il a pu rassembler 383,3 millions $, avec un montant moyen des
campagnes de collectes lancées de 2300$. L’une des plateformes les plus
notables en crowdfunding est la plateforme américaine KickStarter. Au niveau de
l’Europe, on trouve Kisskissbankbank (Europe), et Fringebacker qui œuvre
beaucoup plus en Asie.
- Les
prêts solidaires de pairs à pairs :
Il s’agit de
prêts accordés par des personnes physiques à d’autres individus, sans pour
autant intégrer un taux d’intérêt. On le range dans le secteur de la
microfinance, puisqu’il reflète plus ou moins la transmission des mécanismes
axés sur la finance traditionnelle, engageant le prêt qui est considéré comme
instrument phare dans la finance traditionnelle. Dans la plupart du temps, il
s’agit de micro-prêts accordés par des individus habitant les pays occidentaux
à des personnes vivant dans les pays du Sud. Sans remettre en cause l’utilité
de ce modèle, il faut quand même souligner que certaines plateformes alimentent
la dérive suivante: les instituts de microfinance issus des pays pauvres se
refinancent eux-mêmes grâce à l’argent crowdfunder dans les pays riches,
souvent ils facturent des taux d’intérêts très élevés aux emprunteurs locaux. Néanmoins,
et en 2012, le montant total collecté est de 600 millions $ selon une étude
annelle de Crowdsourcing.org. Ceci nous laisse constater qu’il constitue quand
même un modèle assez rentable au niveau du crowdfunding. L’une des plateformes
les plus présentes dans ce genre de modèle est la plateforme américaine Kiva,
suivie par deux grandes plateformes françaises : Hellomerci et Babyloan.
1.2.2 Les plateformes
spéculatives :
Elles sont plus
complexes que les plateformes non spéculatives, du fait qu’elles sont prises
avec des contraintes réglementaires fortes émanant essentiellement de la
finance traditionnelle. Elles sont de ce fait plus axées sur la notion du
« retour sur investissement », ce qui prône l’argument commercial
pour ce genre de plateformes.
- Contributions
avec contreparties numéraires (versement de royalties)
Dans ce modèle,
les pairs qui investissent financièrement dans les projets deviennent des coproducteurs,
et, à ce titre, ils obtiennent le droit de percevoir des royalties associées au
projet qu’ils ont produit. Ainsi, ce modèle offre effectivement aux pairs
producteurs la possibilité de potentiellement récupérer leur mise initiale,
voire même de gagner plus ; on parle désormais de labels participatifs ou
d’éditeurs participatifs. Selon Vicent Ricordereau, ce modèle représente le modèle
le plus contestable selon l’auteur, puisqu’il y a un risque d’induction des
problèmes de transparence dans le calcul des royalties, ce qui crée un risque
potentiellement élevé supporté majoritairement par les internautes. On peut
citer à titre d’exemple la plateforme allemande Sellaband, qui est beaucoup
plus dédiée au lancement des musiciens, ainsi que la plateforme française My
Major Company.
- Le
prêt entre particuliers avec taux d’intérêt :
Dans ce modèle,
la plateforme intervient en tant qu’intermédiaire entre des particuliers qui, d’un
côté ont besoin d’un prêt pour réaliser un projet entrepreneurial ou domestique
et, de l’autre, sont prêt à allouer leur épargne disponible sous forme de prêts
rémunérés, et cela, sous le contrôle d’autorités publiques fixant les règles de
la finance dans le pays. C’est le modèle qui a, conjointement avec le don, a
contribué à l’accélération du crowdfunding dans le monde depuis 2 ans. Il a
progressé de 111% en 2012 par rapport à 2011 totalisant : 600 millions $. Ca a
également dépassé les 1 milliards de $ en 2013, ceci, pour un montant moyen de
4700 $ par opération. Les plateformes les plus reconnues dans ce modèle
sont : Lending Club (USA), Zopa, Funding Circle (Grande Bretagne), Prêt d’Union (France).
- Investissement
contre prise de participations:
Ce modèle regroupe les plateformes qui
s’intéressent au financement de la création ou de la croissance
entrepreneuriale. Il est d’ailleurs le dernier à être apparu, notamment en
2010. L’investisseur récupère des parts de la société dans laquelle il investit
et qui lui donnent donc droit à un potentiel retour financier. Pourtant ce
segment est le plus touché par des limitations d’ordre réglementaires, ce qui
nécessitait l’intervention du publique pour pouvoir faciliter le développement
de celui-là. L’exemple qui peut être donné est celui de l’initiative du
Président Obama qui a fait signer une loi au Sénat (Jumpstart Our Business Startups
Act) visant à faciliter le développement de ce secteur et diriger ainsi
l’épargne du public en direction de jeunes entreprises américaines. Ce modèle a
progressé de 30% en 2012 par rapport à 2011 totalisant : 115,7 millions $, avec
un montant moyen des campagnes de collectes lancées de 190000$. On peut citer
deux plateformes qui œuvrent dans ce modèle : Wiseed (France), Cofundit
(Suisse).
2.
PRESENTATION DE L’ETUDE
EXPLORATOIRE SUR LE CROWDFUNDING AU MAROC
Dans
divers pays du monde, le crowdfunding se porte bien. Ainsi, année après année,
plusieurs plateformes se créent et viennent stimuler le marché de façon active.
Il faut dire que cette tendance n’est pas prête à s’arrêter. En effet, rien
qu’en Europe, on dénombre plus de 300 plateformes de crowdfunding dont 70
françaises et 72 britanniques. Au Maroc,
bien que les chiffres soient moins importants, la tendance actuelle laisse à
prévoir un bon avenir pour le crowdfunding. Avec deux plateformes actuellement
actives notamment « atadamone » et « smala & co »,
plusieurs projets de plateformes sont en cours de conception.
2.1
ETAT DES LIEUX DU CROWDFUNDING AU MAROC
Le
Crowdfunding au Maroc a connu une évolution remarquable pendant cette dernière
décennie. La généralisation de l’accès à l’internet et à ses différents
services ainsi que l’utilisation de l’outil informatique ont participé à cet
essor.
2.1.1 Évolution du Crowdfunding au Maroc
Au
Maroc, le crowdfunding connait une évolution importante. En effet, selon les
premières statistiques publiées par la plateforme smala & co, depuis 2010
jusqu’au début de l’année 2014, se sont plus de 70 projets qui ont été financé
par ce circuit de financement au Maroc avec un montant global dépassant 2,2
millions de dirhams. Bien que la plupart des campagnes de collecte des 117
projets dénombrés par l’étude de smala & co n’aient pas été lancé au
royaume, le taux de réussite globale de ces dernières a été de 60%. Les figures
3, 4, 5 et 6 montrent les pays de lancement des campagnes de financement de
projets au Maroc par crowdfunding, le montant moyen collecté par campagne,
l’évolution des fonds collectés entre 2010 et 2014 ainsi que la provenance des
fonds.
2.1.2 Facteurs d’évolution du Crowdfunding au Maroc
Bien
que les chiffres actuels soient assez modestes par rapport à d’autres pays, il
faut dire que les spécialistes sont assez optimistes quand au développement de
ce mode de financement dans le royaume. Ainsi selon l’étude de marché établie
par la plateforme « smala & co », qui tient compte du lancement
des deux plateformes actuellement opérationnelles au Maroc et du taux de
croissance accusé par ce secteur, le marché du crowdfunding au Maroc
pourrait dépasser 10 Millions de dirhams en 2016.
Bien
que les professionnels du secteur au Maroc sont assez confiant quand à
l’évolution du crowdfunding, il faut dire que l’essor de ce mode de financement
est assez lié à un ensemble de facteurs qui contribuent à son développement.
Ces facteurs sont aussi bien culturels et sociaux que technologiques.
- Facteurs
culturels et sociaux de développement du crowdfunding au Maroc
Bien
que le crowdfunding est dans une phase embryonnaire au Maroc, plusieurs
spécialistes s’accordent à dire que ce dernier connaitra un essor radieux dans
le royaume. Pour ces derniers, la
culture du pays, marquée par la générosité de ces citoyens, est un facteur
important du développement du crowdfunding.
Ainsi, le Maroc a été classé sixième peuple le plus généreux dans le monde
selon l’indice mondial de la générosité "World Giving Index" publié
par de l’Association britannique
Charities Aid Foundation.
Aussi,
l’attachement des marocains aux principes de l’islam, principale religion dans
le pays, qui prône pour l’entraide collective est un facteur qui peut aider au
développement du crowdfunding au Maroc. Ce constat a été signalé par Sherwood
Neiss et Jason Best, tous deux directeurs du cabinet de conseil spécialisée
dans l'investissement par crowdfunding « crowdfund Capital Advisors ».
Ces derniers ont parlé d'une nouvelle
tendance dans le démarrage et la croissance du mode de financement appelé
crowdfunding. Ils ont mentionné que ce dernier se base certains principes de la
finance islamique et que les nations musulmanes peuvent bénéficier de la
construction d'une « charia crowdfunding ». Un tel système pourrait bâtir
des relations solides entre les peuples, promouvoir la distribution des
richesses et encourager le partage des risques dans les transactions
économiques.
- Facteurs
technologiques du développement du crowdfunding au Maroc
Au
Maroc comme partout dans le monde, le crowdfunding dans sa forme actuelle a
largement bénéficié du développement technologique. A ce niveau, trois points
ont joué un rôle essentiel dans l’émergence et l’évolution de cette forme de
financement. Il s’agit de l’amplification de l’usage de l’internet comme moyen
de communication, du développement du web 2.0 ainsi que des moyens de paiements
électroniques.
Ainsi,
le développement de l’internet au royaume a permit l’accès à l’information à
une large panoplie de personnes. De ce fait, les porteurs de projet peuvent
grâce à ce moyen de communication mener des campagnes de collecte de fonds qui
peuvent toucher des millions de personnes.
A
côté du développement de l’internet, l’apparition et l’utilisation de plus en
plus de la technologie web 2.0 au Maroc comme partout dans le monde a aussi
contribué au développement du crowdfunding. En effet, l’émergence du web 2.0 a
révolutionné la pratique du financement par la foule en permettant aux
internautes porteurs de projets de créer eux-mêmes du contenu et de mener des
campagnes de soutien de leurs projets sans recourir à des moyens publicitaires
couteux. Ainsi, grâce à cette technologie, le porteur de projet devient un
acteur de l’information et son effort dans les réseaux sociaux par exemple qui
se basent sur cette technologie peut largement contribuer à la réussite de sa
campagne de collecte de fonds.
Aussi,
l’usage de plus en plus des moyens de paiements électroniques tels que les
cartes de crédit et les virements par internet ont aussi participé au
développement du crowdfunding. Grace à ces moyens, le transfert de fonds est
plus facile, moins couteux et assez bien sécurisé. De ce fait, les donateurs
n’ont plus à se déplacer et avec un simple clic leur donation est est ainsi
réalisée et validée.
- Facteurs liés aux spécificités et aux préoccupations de
l’entrepreneuriat au maroc
Le
Maroc est un pays en voie de développement qui connait une croissance assez
modeste de son économie. Pour pouvoir booster cette dernière, les créations
d’entreprises innovantes et à potentiel technologique élevés sont de plus en
plus nécessaires pour l’économie du pays. Vu que ces créations sont liées à
l’innovation, les moyens de financement classiques ne peuvent assurer cette
tache, d’où l’utilité du crowdfunding pour ce type d’entreprises.
En
effet, dans une étude assez récente que nous avons effectuée auprès d’un
échantillon de 38 cyberentrepreneurs PME
de la région nord du Maroc auprès desquels nous avons administré un
questionnaire, nous avons remarqué d’une part que le volet le plus important pour
ces derniers reste le financement et le volet financier du projet. Subséquemment,
sur les 38 cyberentrepreneurs étudiés, le volet financier est celui qui a
suscité le plus de préoccupation et d’intérêt (63,29%), suivi du volet
commercial (31,6%) et du volet technique (26,3%). Alors que le volet technique
et celui administratif et juridique n’ont pas représenté de véritables soucis,
ils ont été classés respectivement en 4ème rang (10,5%) et 5ème rang (5,3%). D’autre part, nous avons constaté aussi d’après
les critères de préférence d’emplois et du comportement vis-à-vis du risque que
71,1% de ces entrepreneurs enquêtés ont une aversion assez importante vis-à-vis
du risque. Ainsi, on peut dire que le profil de ces entrepreneurs marqué par
une assez importante aversion du risque fait du crowdfunding un mode de
financement idéale pour ces derniers.
2.2 PLATEFORMES ACTIVES DU CROWDFUNDING AU MAROC
Avec
l’émergence au Maroc d’une jeunesse créative et innovante mettant en place de
nouveaux projets, le besoin en matière d’alternatives aux circuits de
financement traditionnels s’est montré dans le royaume. Ainsi l’année 2014 a vu
la fondation de deux plateformes dédiées au financement participatif, notamment
la plateforme « atadamone » et la plateforme « smala & co ».
Bien qu’à ce jour on dénombre seulement ces deux plateformes qui sont actives
au royaume, ces dernières ont pu financer des dizaines de projets. Il faut
cependant mentionner que ces projets n’ont pas eu tous le même succès.
2.2.1 Plateforme
« Atadamone »
Il
s’agit d’une plateforme crée à l’initiative
de deux cadres Marocains résidant en France. Selon ces dirigeants Khalid
Farrahe et Jamal Aatif, la plateforme « Atadamone » a nécessité plus d’un an de recherche et de préparation
et vise à mettre en place un outil de financement participatif pour les projets
marocains et africains. Ces projets peuvent être dans plusieurs domaines tels
que les nouvelles technologies, la recherche scientifique, les projets
touristiques, solidaires et artistiques…
Ainsi, avec cette plateforme, des projets qui ne pouvaient se financer
par les circuits traditionnels peuvent voir le jour. Les fondateurs de cette
plateforme estiment que les marocains aussi bien résidents dans le royaume qu’à
l’étranger seront réceptifs aux projets véhiculés par cette dernière.
En
matière de projets financés, la plateforme compte trois catégories, à savoir
les projets business, sciences et musique. Les projets business comprennent des
projets de création d’entreprises, ou d’associations à caractère commercial qui
ont un aspect novateur et bénéfique. Les projets sciences sont des projets qui
revêtent un caractère scientifique. Il s’agit notamment d’organisation de
journées d’études, de colloques… Enfin, les projets musique sont des projets en relation avec le domaine musical.
En
matière de fonctionnement, la sélection des projets se fait après la
proposition des soumissionnaires de leur projet qu’ils souhaitent financer par
la foule. Avant de soumissionner leurs projets, ces derniers sont invités par
les administrateurs de la plateforme « atadamone » à bien les étudier. En effet, pour être accepté,
un certain nombre de critères doivent figurer dans le projet. Subséquemment, ce
dernier est appelé à être tangible, à intéresser la foule, à retenir son
attention ainsi qu’à être simple à présenter.
Les
projets acceptés par la direction de la plateforme sont de ce fait présentés au
publique via le site internet atadamone.mipise.com. Les contributeurs
intéressés par ces derniers peuvent ainsi y contribuer via internet par une
simple transaction de paiement par carte bancaire ou par virement. Ces fonds
collectés sont cantonnés dans un compte de paiement qui va se solder après la
fin de la campagne soit par le versement de ces fonds au porteur du projet si
la campagne est réussie ou par le
remboursement des fonds collectés aux donateurs sans frais si le projet
n’atteint pas son objectif. Dans le cas où le projet est non remboursable, les
contributions restent définitivement acquises au porteur de ce dernier vu qu’il
n’y a aucune condition de succès de la campagne. Il est à signaler que le
porteur de projet peut prévoir des avantages pour les donateurs. Il s’agit
ainsi d’un moyen de les inciter à participer à la campagne de collecte et de
leur fournir un sentiment d’attribution du projet. Pour fonctionner, le contrat
conclu entre Atadamone et le porteur de projet prévoit une rémunération de la
plateforme pour le service mis à sa disposition.
2.2.2 Plateforme
« Smala & co »
Il
s’agit d’une plateforme de Crowdfunding binationale maroco-française. Créé en
2014, « smala & co » vise principalement à aider les statups et
les entrepreneurs culturels à démarrer leurs projets en leurs fournissant un
moyen de financement qui s’éloigne des circuits traditionnels. En effet, avec
l’assèchement des liquidités et l’accès de plus en plus difficile des porteurs
de projets innovants aux financements, la plateforme « smala &
co » cherche à remédier à ce problème et à offrir aux porteurs de projets numériques,
artistiques, culturels, écologiques et solidaires, la chance de les réaliser.
Ainsi, avec son système de paiement en ligne sécurisé, les donateurs intéressés
par un projet peuvent offrir leur contribution à ce dernier via le site de la
plateforme. Subséquemment, des critères d'innovations, d'impacts sociaux,
écologiques, artistiques et culturels sont utilisés par la direction du site
dans le choix des projets à présenter au publique.
Pour
utiliser la plateforme « Smala & co », le porteur de projet
commence par soumettre ce dernier à la direction du site via le renseignement
d’un formulaire de proposition de projet. Ce dernier contient la description du
projet, la somme nécessaire à sa réalisation, les contreparties et quelques
liens vers les sites, pages des fans ou articles s’y apportant. Après cette
étable, commence l’étude du projet soumis par l’équipe de la plateforme
« Smala & co » sur la base des critères d'innovations, d'impacts
sociaux, écologiques, artistiques et culturels, d’absence de connotations
politiques ou religieuses. A part ces critères, l’équipe « smala &
co » s’assure aussi de la fiabilité du projet ainsi que des personnes
chargées de sa création. Toutefois, certains projets proposés sont encore
naissants et donc leur viabilité n’est pas encore assurée. Suite à la décision
de l’équipe chargée de l’étude des projets, l’acceptation ou le rejet de ce
dernier est signalé au porteur. Dans le cas ou le projet est accepté, il est intégré
dans un incubateur dans l’attente d’avoir le soutien de 5 proches. Cette phase
accomplie, le projet est publié dans le
site de la plateforme smalaandco.com et la campagne de collecte est lancée.
Suite à l’arrivée à échéance et le succès de cette dernière, le porteur reçoit
les sommes collectés après prélèvement des commissions sur les contributions
qui s’élèvent à 6% et refacturation des frais monétiques. Dans le cas ou la
campagne n’aboutit pas, les donations sont restituées aux donateurs. Dans le
cas contraire, le donateur reçoit un email lui notifiant l’acceptation de son
soutien. Il peut aussi recevoir des récompenses à l’issue d’une collecte
réussie. Bien que ces dernières ne soient pas obligatoires, elles sont
fortement recommandées et souhaitées par l’équipe de la plateforme « Smala
& co ». En effet, la plateforme estime que ce geste fait généralement
plaisir aux donateurs et permet de les fidéliser
BARRIÈRES AU DÉVELOPPEMENT DU CROWDFUNDING AU MAROC
Bien
que Le financement de projets par le crowdfunding soit une pratique qui devient
de plus en plus connu par les jeunes et ambitieux entrepreneurs marocains, plusieurs
barrières entravent son expansion dans le royaume. Ces barrières sont aussi
bien d’ordre législatif que financier.
3.1 Barrières législatives du
développement du crowdfunding au Maroc
Bien que le crowdfunding est une réalité en
développement au Maroc, la législation du royaume n’a pas encore créé un cadre
législatif et réglementaire adapté à ce circuit de financement. En l’absence de
ce cadre, le crowdfunding sur le territoire marocain reste régit par la
Circulaire n°2/2005 relative aux conditions et procédures d’instruction des
demandes d’appel à la générosité publique. Cette dernière reste cependant
longue et inadaptée aux exigences et au développement de ce nouveau mode de
financement. En effet, la lourdeur administrative stipulée par cette circulaire
ne peut convenir aux porteurs de projets qui demandent un financement par
crowdfunding nécessitant un processus simple et fluide.
Ainsi, pour contrecarrer ce problème, les deux
principaux sites de crowdfunding destinés au Maroc se sont installés en France
qui a adopté en 2014 l’Ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014 relative au
financement participatif. De ce fait, les porteurs de projet utilisant les
plateformes « atadamone » et « smala & co » rentrent
dans le cadre de la réglementation française en la matière. Cette dernière
considère ces plateformes comme des intermédiaires en financement participatif
et fait bénéficier les projets à financer par crowdfunding d’un ensemble de
dispositions souples et adéquates.
3.2 Barrières relatives au manque de viabilité financière
Bien que les fonds collectés par crowdfunding deviennent
de plus en plus importants au Maroc, le business model des plateformes
actuellement en place n’est pas assez intéressant d’un point de vue financier
pour un entrepreneur. En effet, ces dernières sont essentiellement des « marketplace »
qui font le lien entre une demande et une offre moyennant des commissions qui
n’excèdent pas 6% des fonds collectés. Ce taux de commission qui est assez
élevé reste limité par les dépenses nécessaires pour obtenir un utilisateur
effectif ainsi que les frais de transactions qui sont relativement élevés au
Maroc. D’un autre côté, ces plateformes ne peuvent proposer qu’un nombre
limité de projets à financer de peur d’avoir trop d’offre et de ce fait l’échec
des campagnes de collectes de fonds.
3.3 Le manque de confiance des parties prenantes
L’un des principaux défis spécifiques dont
fait face les services le financement par crowdfunding au Maroc comme partout
dans le monde reste le manque de confiance en les parties prenantes. En
effet, avec la multiplication des arnaques utilisant l’internet, les donateurs
sont assez méfiant des porteurs de projet ainsi que des plateformes qui font
office d’intermédiaire entre ces derniers et les donateurs. Aussi, en cas de problèmes, il est assez difficile de
recourir aux institutions judiciaires ainsi que d’inscrire une police
d’assurance qui peut aider à assoir un climat de confiance et de sécurité entre
les parties.
CONCLUSION
Le
crowdfunding a connu un essor sans précédent, lié surtout à l’apparition
d’internet et des divers progrès technologiques et de communications
révolutionnaires. Ce mode de financement a ainsi concerné plus ou moins tous
les secteurs, ce qui a facilité le recours à un tel circuit de financement pour
un nombre très important des projets. De ce fait, et si l’on analyse de près
les influences qu’ont eues lieu sur l’économie mondiale, le crowdfunding a
contribué à bannir les procédures et documents administratifs qui rigidifient
la mise en place des projets. Il a ainsi permis aux promoteurs d'idées de
libérer leur créativité, ce qui a mis en marche divers projets sans pour autant
avoir le consentement des banques qui demandent des garanties souvent
inconcevables, avec des taux d’intérêts qui frôlent les nuages. Le crowdfunding
a aussi fait en sorte que la communication devienne plus accessible entre un
nombre infini d’experts qui peuvent contribuer au développement de projets
innovants ainsi que d’avoir le feedback à la minute près des collaborateurs. Ce
qui caractérise également le crowdfunding est l’absence totale de risque
supporté par l’investisseur, puisque celui-ci n’a plus ou moins rien à perdre
compte tenu des opportunités qui s’offrent à lui tout en lui permettant de
suivre son profil de façon régulière. Ainsi, ce mode de financement qui prend
de l'ampleur au fil des années reste aujourd'hui le principal concurrent des
banques.
Au
Maroc, bien que les campagnes de crowdfunding se soient largement développées
durant les quatre dernières années, la quasi majorité de ces dernières ont été
lancées dans d’autre pays vu l’absence de réglementation marocaine relative à
ce mode de financement. Cette absence de cadre réglementaire a aussi contraint les deux plateformes
d’intermédiation en la matière récemment actives à s’installer en France, pays
qui dispose d’un cadre légale adaptée à ce mode de financement. Aussi, le
manque de rentabilité du business model ainsi que de confiance des parties prenantes
entravent le développement du crowdfunding au Maroc.
Pour
remédier à ces problèmes certaines solutions peuvent aider les plateformes
actuelles à se développer ainsi qu’à se pérenniser. Ainsi, les autorités marocaines
sont appelées à mettre en place un cadre réglementaire adéquat à ce mode de
financement afin de convaincre les plateformes actuelles à s’installer dans le
pays. D’un autre coté, ces plateformes doivent se trouver des porteurs de
projet qui ont des assises financières assez solide ainsi qu’une notoriété
inspirant la confiance des donateurs afin de palier au problème de manque de
confiance. De plus, vu que les
difficultés techniques liées à la création de ces plateformes sont assez faibles
et que les investissements initiaux ont déjà été supporté par les plateformes
actuelles, il est primordiale aujourd’hui que l’intermédiation en crowdfunding
concerne une panoplie de pays de la région et non pas seulement le Maroc. Cette
expansion régionale est une mesure nécessaire pour réaliser un important volume
et de ce fait améliorer la rentabilité de ces plateformes.