La méthode UVA

Présentation générale de la méthode

La méthode UVA est une méthode de calcul de coûts de revient complets d’origine française qui constitue une alternative intéressante face à d’autres méthodes plus connues telles que « les centres d’analyse » ou « les coûts par les activités ».

Ses origines

Georges Perrin a développé la méthode GP (Georges Perrin) dans les années quarante. Georges Perrin est né le 6 novembre 1891 à Chalon-sur-Saône et était ingénieur issu de l’école Centrale.
Au cours de son expérience professionnelle, il a été régulièrement confronté au problème de la répartition des charges indirectes dans le prix de revient des articles fabriqués. Georges Perrin partit du principe qu’il est impossible d’attribuer correctement à chaque série d’objets fabriqués les frais nécessaires, car il n’y a pas d’unité de mesure commune. L’unification de la production peut se faire en déterminant « l’effort de production », efforts directs et indirects de production nécessaires à la fabrication d’un produit. L’unité choisie pour mesurer l’effort de production est le GP, qui peut correspondre à une machine particulière ou à une pièce déterminée et qui sera dénommé « article de base ».
Les frais d’une entreprise peuvent être répartis en frais imputables et non imputables.
Georges Perrin  pose le principe des constantes occultes : les rapports entre les efforts de production mis en œuvre pour différents produits restent stables dans le temps. La méthode s’inscrit dans une approche fondée sur les équivalents de production.
En 1946, il crée un cabinet de conseil La Méthode GP. Afin de promouvoir sa méthode, il publia de nombreux articles dans des revues professionnelles. Il dirigea son cabinet jusqu’à son décès, le 5 février 1958. Son épouse, Suzanne Perrin, poursuivit l’activité du cabinet et assura la publication en 1963 d’un ouvrage de Georges Perrin sous le titre « Prix de revient et contrôle de gestion par la méthode GP ». En 1969 le cabinet de Georges Perrin est définitivement fermé et seul le cabinet Les Ingénieurs Associés (LIA) fera survivre la méthode sous la dénomination de « méthode UP ». Jean Fiévez et Robert Zaya font évoluer la méthode à l’analyse de la quasi-totalité des charges de l’entreprise. En 1995, le nom de la méthode change et devient méthode UVA (Unité de Valeur Ajoutée).
La méthode est assez peu diffusée de nos jours. Quelques facteurs peuvent expliquer cette faible diffusion :
  • Georges Perrin a toujours voulu contrôler la diffusion de sa découverte ce qui a fortement limité le champ d’expérimentation ; après sa disparition, son épouse a adopté la même attitude.
  • L’émergence, à l’époque, d’autres méthodes concurrentes : les sections homogènes, le direct costing, les coûts standards …
  • Des difficultés de communication entre des ingénieurs (Georges Perrin, le cabinet des Ingénieurs Associés) et les responsables de services comptables et financiers.

Ses objectifs

La méthode U.V.A. est une méthode de calcul de coûts complets. Toutefois, sa portée est plus large :
  • comprendre tous les processus de production et de vente des articles,
  • mesurer la valeur ajoutée par chacun de ces processus,
  • évaluer le bénéfice ou la perte au niveau de chaque transaction avec les clients de l’entreprise.

Le développement de la méthode

La mise en œuvre de la méthode comporte plusieurs étapes.

1 L’analyse des postes

La première étape consiste à réaliser l’inventaire des postes UVA et de procéder à leur analyse technico économique.
Un poste UVA est considéré comme un ensemble homogène de moyens matériels et humains.
Une gamme opératoire est une suite d’opérations, réalisées sur des postes dans un temps donné. L'entreprise est constituée d'une somme de postes UVA et fonctionne comme un réseau de gammes opératoires.
Une opération élémentaire de travail correspond à un poste de travail ou à une fraction d’un poste de travail dont les charges peuvent être réparties sur les opérations de fabrication ou sur les objets fabriqués. Le total des charges imputables à une opération élémentaire de travail, ou poste, est appelé taux du poste. Il s’agit d’identifier les ressources consommées par les différents postes et non pas de répartir les charges de l’entreprise entre les postes.

2 Le choix de l’article de base

L’article de base est défini comme un article réel ou fictif censé représenter le mieux les activités de l’entreprise. Il est l’unité de mesure du calcul de la valeur ajoutée produite et est appelé unité de valeur ajoutée ou U.V.A. Ce sont les consommations de ressources nécessaires à la réalisation d’un article de base.
L’U.V.A. correspond, en fait, à des modes opératoires à un instant t. Ainsi, l’U.V.A. reste invariable dans le temps comme le mètre ou le kilogramme, sauf si ces modes opératoires sont modifiés.
Le taux de l’article est obtenu en additionnant le coût de chaque opération utile à produire l’article de base.

3 Le calcul des indices UVA

Une fois l’article de base fixé et son taux calculé, les indices UVA des postes sont formés par la division des taux de ceux-ci par le taux de l’article de base. Tous les produits ou services peuvent alors être déterminés par leur équivalent UVA sachant qu’ils résultent d’une succession de gammes d’opérations.
Équivalent UVA d’une  = S Indices des postes UVA     x   Temps d’utilisation
gamme UVA                         utilisés (UVA/h)                            (en h)
Puis,
Équivalent UVA d’un    = S Équivalents UVA des gammes requises
bien ou service                    pour le bien ou le service
La stabilité de ces indices dans le temps est un aspect important dans la méthode. Il s’agit des constantes occultes évoquées par Georges Perrin. Toutefois, en cas d’évolution technologique, les indices des postes doivent être réévalués et  tous les 5 ans, la phase d’analyse des postes doit être recommencée pour réévaluer les indices UVA.
Il est également possible de calculer l’indice UVA d’une vente à un client. Grâce à la facture, les gammes administrative, commerciale et logistique mises en œuvre sont identifiées.

Équivalent UVA d’une vente = S Équivalents UVA des biens ou services mobilisés par la vente

4 La mesure de la production globale de l’entreprise

La production globale de l’entreprise peut être suivie et mesurée par le nombre total d’UVA produites pendant la période étudiée. Pour cela, les gammes de production sont utilisées pour valoriser en UVA chacun des articles et services produits.

Production globale de l’entreprise = S Équivalents UVA des biens ou services produits au cours de la période
Cet indicateur permet de suivre l’activité de l’entreprise dans le temps en neutralisant les effets de l’inflation. La mesure de la production en une unité commune (UVA) est faite hors de toute unité monétaire. Les UVA des produits fabriqués peuvent être additionnées sans difficulté avec les UVA des services apportés aux clients.

5 L’évaluation des coûts de revient

Pour obtenir la valeur de l’UVA en euros de la période étudiée, il suffit de diviser le total des charges imputables et non imputables de l’entreprise par le nombre d’UVA produites. S’agissant d’une approche de calcul de la valeur ajoutée, ces charges ne tiennent pas compte des achats incorporables aux produits ni des charges spécifiques telles que transports sur ventes ou commissions imputés directement par ailleurs aux services fournis aux clients.
Le coût de l’UVA pour la période déterminée étant calculé, il est maintenant possible de valoriser les produits, les services ou les factures.
Un produit est une somme de gammes opératoires pour le concevoir, l’industrialiser, le fabriquer ou le contrôler. La valeur d’un produit est égale à la somme des UVA de ces gammes opératoires de production, somme à laquelle est ajouté le coût des matières incorporées.
Un service client est une somme de gammes opératoires pour le commercial, le traitement de la commande, la livraison, … La valeur du service client est le total des équivalents UVA de cet ensemble de services fournis par l’entreprise au client.
Coût de revient d’une vente = coût des produits livrés + coût du service au client
Le coût obtenu est toujours complet, l’ensemble des charges étant toujours réparti entre l’ensemble des produits et services de l’entreprise.
Il est supposé qu’à chaque vente est associée une et une seule facture.
Résultat d’une vente   =   Chiffre d’affaires de la vente  -   coût de revient de la vente

6 L’analyse de rentabilité des ventes

Les résultats de toutes les ventes effectuées au cours d’une période étant connus, il est possible d’en donner une représentation graphique sous forme d’histogramme. Les ventes sont classées par ordre de rentabilité croissante.

Avantages :

  • méthode fine d’analyse des activités permettant une analyse précise des coûts et de la rentabilité des ventes. C’est là un progrès par rapport à la méthode ABC dont les difficultés de mise en œuvre ne permettent pas l’analyse de toutes les activités de l’entreprise ;
  • l’hypothèse de stabilité des indices dans le temps permet d’économiser un temps considérable lors des phases de calcul des coûts et résultats. De plus, ces calculs sont assez simples et peuvent être réalisés par le service comptable sans recours à un contrôleur de gestion ;
  • le coût d’utilisation de la méthode est modéré et peut convenir aux PME/PMI qui n’ont pas les moyens de financer et d’entretenir un système d’information élaboré (ERP, par exemple) pour le suivi de modèles plus complexes tel l’ABC ;

Inconvénients :

  • l’analyse technico économique initiale des postes de l’entreprise est lourde et complexe ;
  • du fait de sa faible notoriété, la méthode n’a été appliquée qu’à quelques dizaines d’entreprises, des P.M.E. pour l’essentiel, en France, au Brésil et aux États-Unis.
  • la terminologie est encore approximative. Par exemple, le concept de valeur ajoutée employé dans la méthode peut engendrer des confusions (consommation de toutes les ressources, y compris les matières consommables, à l’exception des matières premières) ;
  • certains aspects techniques de la méthode sont sans doute discutables : par exemple, toutes les charges sont considérées comme directes pour la valorisation des postes UVA. De même, il n’y a pas de retraitement des charges de la comptabilité générale et donc pas de charges non incorporables, d’éléments supplétifs. Les seules charges non incorporables sont celles pour lesquelles aucune loi, aucun lien n’a pu être trouvé avec le poste UVA. Ces charges sont malgré tout affectées proportionnellement aux charges directes.
  • La méthode semble précise et fiable. Néanmoins, des études complémentaires semblent nécessaires pour tester l’hypothèse de stabilité des indices ou pour mesurer l’impact du choix de l’article de base sur l’ensemble des coûts.

Conclusion :

La méthode UVA présente des aspects très attractifs en particulier pour les PME/PMI.
Toutefois, elle ne semble pas complètement finalisée et son champ d’application est encore limité.
Il n’en demeure pas moins que cette méthode est conceptuellement très intéressante et peut présenter un grand intérêt pédagogique.


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