Les profils et les rôles du contrôleur de gestion
Si c’est avant
tout une fonction de l’entreprise, le contrôle de gestion s’est
progressivement défini comme une discipline à part entière (Antony
1965).
Dans sa définition de 1965,
Antony rappelle qu’il s’agit d’un ensemble de processus par lesquels les
managers s’assurent de l’atteinte efficace et efficiente des objectifs de
l’organisation.
Les managers sont chargés de la
mise en œuvre de ce processus en utilisant le travail du contrôleur de gestion.
Au-delà des connaissances
financières, un contrôleur de gestion doit donc être doté d’une solide assise
dans les domaines de l’organisation, des systèmes d’information, des ressources
humaines et des techniques d’expression.
Mais il reste intéressant de
s’interroger sur la question de savoir où va le métier de contrôleur de gestion
aujourd’hui.
Tout dépend de la conception
qu’adoptera l’entreprise de la fonction de contrôle :
- Si cette
conception est autoritaire, l’action de contrôle restera prépondérante.
- Mais si
cette conception est démocratique, le contrôleur devra s’effacer devant le
manageur en assurant plus qu’une fonction d’accompagnement et de remise en
cause des décisions managériales.
Comme le rappelle Antony,
« s’assurer » signifie « vérifier » mais aussi « faire
en sorte ». Ces termes rappellent respectivement les notions de contrôle
et d’accompagnement.
En définitive, le métier de
contrôleur se trouve enrichi par la nécessité de s’intéresser à la genèse des
résultats par référence aux données d’environnement. Telle est aujourd’hui son
évolution.
B. Au cœur du métier de
contrôleur : l’information (sa collecte, sa diffusion, son organisation)
S’agissant de la collecte
d’information, c’est une évidence, mais comme le soulignent les auteurs, on est
passé de l’âge de la calculette à celui des bases de données relationnelles.
Ceci a donc induit une évolution
majeure du rôle d’informateur du contrôleur de gestion : le problème n’est
plus la production de données mais la qualité d’analyse de ces dernières.
Mais il reste que la tache du
contrôleur de gestion comporte aussi des opérations de nature administrative et
plus précisément des opérations touchant à l’efficacité administrative.
Il doit faire en sorte de gagner
du « temps-homme » c'est-à-dire réduire les effectifs attachés à des
routines comptables administratives, gagner des jours, écourter les délais etc…
Il a donc ici
un rôle « d’architecte rénovateur
des systèmes » et également un rôle « d’architecte animateur » de ces nouvelles procédures
d’information.
Parmi tous les « premiers
rôles » du contrôleur on peut donc identifier un rôle d’administrateur des
procédures et des systèmes d’information, mais aussi un rôle d’animation
de ces mêmes procédures et systèmes, qu’il s’agit de faire vivre et auxquels il
faut donner un sens dans l’entreprise.
Celui-ci peut prendre des formes
diverses allant du simple « délégué aux études économiques », aux
figures plus engagées de « conseiller du Prince ».
Il est considéré comme le
« délégué aux études économiques » par les managers auxquels il est
directement rattaché.
Il se retrouve donc dans la
sphère d’aide à la décision. Sans jamais se substituer au décideur, il participe
à la remise en question des opérationnels en leur apportant le contradictoire
nécessaire :
·
il peut servir d’aiguillon
pour aider les décideurs à redresser les résultats avant qu’il ne soit trop
tard.
·
il se doit de ne pas être
surpris tous les mois par les chiffres qui tombent. Il doit donc être
capable d’anticiper.
Pour faciliter cette maîtrise
informationnelle, le contrôleur de gestion doit fiabiliser les procédures et
les circuits d’information et s’ouvrir à l’organisation.
Il est en contact avec 4 catégories
de personnes internes à l’entreprise :
-
le supérieur hiérarchique direct
-
les collègues opérationnels
-
le contrôle de gestion central
-
la direction générale du groupe
Mais son rôle comporte tout de
même une grande ambiguïté : quelle entité interne le contrôleur sert-il en
premier ? La direction ou les directions opérationnelles ? Le siège
ou ses interlocuteurs locaux ?
La seule issue pour garder leur
crédibilité est de tenter d’apporter une valeur ajoutée concrète directions, questionnement pour le compte
de la direction mais aussi à l’égard de la direction.
D. Un dernier rôle, enfin est celui
d’architecte des procédures, du système d’information et de l’organisation
Ce sont souvent les structures de
responsabilité qui sont à nouveau pensées :
-
tantôt à travers une nouvelle
définition des centres de responsabilité et de leur nature
-
tantôt à travers une mutation plus
profonde en terme de projet ou de processus.
En définitive, le métier de
contrôleur de gestion, dans son rôle d’architecte ou de rénovateur de systèmes,
consiste à rendre cohérente les actions de l’entreprise dans le temps.
Il doit articuler en
permanence le court et le long terme.
Nous pouvons dégager trois
dimensions principales qui participent du rôle de contrôleur de gestion :
·
une dimension de contenu,
qui est celle du traitement et de l’analyse de l’information
· une dimension
relationnelle, qui concerne l’interdépendance entre le fournisseur
(d’informations) et ses « clients » (agents qui possèdent les infos)
internent que sont les manageurs
· Enfin, une dimension
organisationnelle, qui touche à la refonte des systèmes d’information et
son impact sur les structures d’organisation
Chaque dimension peut être
pratiquée de façon « minimaliste » ou au contraire développée
par le contrôleur en fonction de sa personnalité ou des exigences inhérentes à
l’entreprise.
Mais un certain nombre de facteurs
générateurs de contingences viennent influencer la réalité quotidienne du
contrôleur de gestion comme :
-
le secteur d’activité de
l’entreprise
-
la conception du métier plutôt
comptable ou acteur du changement
-
la taille de l’organisation
-
la place du contrôleur de gestion
dans l’organisation
En réalité bien sûr, au delà de
la vocation pédagogique des cette présentation, les différents rôles présentés
ici s’imbriquent souvent.
L’organisation du service de contrôle de gestion
L’efficacité des processus de
contrôle dépend de l’organisation des services.
En raison de son caractère
fonctionnel, un service de contrôle de gestion (CG) peut être rattaché à la
direction générale (DG), à la direction administrative et financière (DAF) ou
encore aux directeurs ou responsables opérationnels (DO/RO).
En second lieu, l’organisation
interne de l’activité de contrôle de gestion varie considérablement d’une
entreprise à l’autre, tant à l’intérieur des services de contrôle que
dans les relations qui constituent les réseaux de contrôleurs.
Voyons donc à quelle entité
rattacher le contrôle de gestion et étudions l’organisation interne du
service.
Qui dit rattachement
hiérarchique, dit subordination. Mais il reste préférable que le contrôleur
soit indépendant vis-à-vis de ceux qu’il doit contrôler.
L’indépendance du contrôleur de
gestion a plusieurs modes de manifestation, parmi lesquels :
-
l’acuité et la pertinence du
traitement de l’information de gestion
-
les délais de remonté de cette
information
L’organisation du contrôle
en service fonctionnel rattaché à la direction générale est à cet effet la
plus apte à garantir l’indépendance de cette activité.
La proximité du contrôle avec
les opérations :
§
La disponibilité des
données
Une première question est de
savoir qui a autorité sur les informations de gestion.
Aujourd’hui, la majorité des
entreprises rattachent à la Direction Administrative et Financière le service
de contrôle de gestion. En terme de traitement des données comptables, les
avantages sont de plusieurs ordres. Par une telle organisation, on peut en effet :
-
éviter les ressaisies de mêmes
données
-
éviter la formation de deux canaux
parallèles d’information (comptabilité et contrôle) dans lesquels transitent
les mêmes données de base ;
-
et ainsi, s’assurer d’une plus
grande fiabilité des informations produites
On comprend en quoi l’avènement
des bases de données centralisées a pu apporter une réponse partielle à ces
préoccupations
§
L’apport des bases de
données
Une base de données centrales
permet d’y concentrer l’ensemble des données physiques et comptables dont
peuvent avoir besoin indifféremment comptables et contrôleurs. Ces bases de
données peuvent se structurer
-
soit de façon hiérarchique :
grâce à une nomenclature universelle (plan comptable général ou analytique
adopté par l’entreprise), l’utilisateur est guidé vers l’accès aux données
qu’il recherche.
-
soit de façon relationnelle :
c’est le cas des bases de données actuelles dont les données sont accessibles à
l’aide d’items qui leurs sont attachés, ce qui ne force aucun acteur à se
contraindre à la nomenclature adoptée par d’autres.
L’espace d’action réservé au
contrôle de gestion
De part sa nature, le contrôle de
gestion entre en liaison avec d’autres activités et d’autres fonctions de
l’entreprise (informatique, activités du chiffre, activité consistant à
récupérer des données afin d’assurer le pilotage). Mais s’il est possible de
n’étudier spécifiquement que le contrôle de gestion au sens professionnel du
terme, en laissant de côté la fonction de contrôle inhérente à tout acte de
management, dans la pratique, la séparation entre ces deux fonctions reste
poreuse. Etudions donc le contrôle de gestion au sens professionnel :
§
Le contrôle stratégique :
Les entreprises tendant à
pratiquer ce que l’on appelle le contrôle stratégique. Il peut s’agir,
par exemple, d’un suivi de la réalisation de la planification stratégique.
La veille stratégique est parfois aussi rattachée à cet aspect (ceci est plus
rare et réservé à la haute technologie).
§
L’évaluation des
performances individuelles et le contrôle de gestion social :
Le contrôle de gestion doit
connaître de l’activité des ressources humaines pour deux raisons :
-
évaluant les performances de
services, le contrôle de gestion évalue par conséquent celle des
personnes. Mais cette activité ne peut se substituer aux activités
traditionnelles des ressources humaines (entretien individuel)
-
Les outils de contrôle spécifique
à la gestion du personnel tels les tableaux de bord sociaux ont
tendances à se développer mais ils demeurent bien souvent la chasse gardée de la DRH.
§
Le contrôle et l’audit
interne
Comme il l’a été rappelé, le contrôleur
développe aujourd’hui son rôle de conseil interne. Mais il ne marche pas
nécessairement sur les plate-bandes de l’audit interne et ce pour plusieurs
raisons :
-
Les interventions des auditeurs
sont ponctuelles alors que le contrôleur agit en suivi ;
-
L’audit interne est, en
règle générale, concentré sur la conformité de procédures, alors que le
contrôle (du moins au niveau local, et s’il s’en donne les moyens), effectue
un conseil plus « fondamental » (cf. son rôle d’architecte et d’aide
de décision)
Il existe des modes de
coopération entre audit interne et contrôle de gestion :
Tout d’abord, le contrôle de gestion agit dans
les intervalles de temps qui séparent les deux missions d’audit. L’un rend une
analyse précises et symptomatique d’éventuels dysfonctionnements ou
améliorations, l’autre fait en sorte que d’ici les prochaines missions, le
problème soit réglé.
En second lieu, l’audit interne
veille à ce que les procédures de saisies de données comptables soient
respectées.
La fiabilité des données
exploitées par le contrôle de gestion dépend donc du travail de l’audit
interne.
Au-delà du service de contrôle de
gestion, il convient aussi de considérer le contrôleur de gestion comme chef
de service ou d’équipe. Un contrôleur central (ou contrôleur siège) va
devoir gérer une équipe et un réseau de contrôleurs de gestion disséminés dans
l’organisation, responsabilité qui s’ajoute à la précédente.
- La logique d’organisation d’un service de
contrôle de gestion
Pour organiser ce service, il
faut distribuer les rôles en tenant compte du fait que le contrôle de gestion
fonctionne autour d’un ensemble précis d’outils (budget et tableaux de bord,
plans d’actions). Une voie classique s’impose : «une personne (ou un
groupe de personnes) par outil ». Cette méthode favorise le développement
de l’expertise sur chaque outil mis elle occasionne un cloisonnement du processus
auquel on ne peut remédier que par une consultation constante des uns et des
autres (perte de temps).
Une autre technique d’organisation
est préférable, notamment dans les sièges de groupe de taille importante :
une structure par « client » interne : une personne
ou une équipe est assignée à une entité de l’entreprise, pour laquelle elle
gère les outils, produit de l’information, fournit du conseil. Elle a de
surcroît une marge de manœuvre pour concevoir des outils spécifiques
à ses clients. Une consultation régulière des membres de l’équipe reste
nécessaire mais une fois les objectifs définis, les membres de l’équipe peuvent
travailler de manière quasi autonome. Elle débouche sur une meilleure
connaissance des problèmes des opérationnels et conduit à une meilleure
efficacité.
C’est donc au contrôleur de
gestion en tant que chef de service de procéder à ce type de choix.
- Le contrôleur manager :
Lorsqu’il dirige un service, le
contrôleur de gestion devient à son tour manager. Il organise le travail,
recrute, forme et évalue le personnel dont il a la charge. Un tel service peut
atteindre une cinquantaine de personnes, même si l’on préfère aujourd’hui
décentraliser les services fonctionnels pour obtenir une meilleure efficacité.
- Les réseaux de contrôleurs de gestion :
Un contrôleur de gestion central
est à la tête d’un réseau de contrôleurs dans une grande entreprise. Pour
assurer un minimum de cohérence dans ce réseau, il doit saisir la structure
du réseau, et s’assurer que les contrôleurs ont un langage commun.
Mais le plus souvent, dans les
grands groupes, les contrôleurs de chaque niveau sont rattachés
hiérarchiquement aux niveaux qui sont leurs clients internes. Les liens entre
contrôleurs n’en sont que plus distendus, ce qui nécessite de multiplier les
rencontres entre contrôleurs pour leur permettre d’échanger et entretenir un
langage et un niveau de qualité homogène dans leur travail (formation interne,
journées à thème…)
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