L'objectif est
d'obtenir une évaluation économique de l'actif net de la société. Les documents
comptables délivrent une première information sous la forme d'une situation
nette comptable. Elle n'est qu'un point de départ puisqu'elle reflète une
réalité plutôt comptable qu'économique. Pour se rapprocher de la valeur
économique de l'actif net de la société, différents ajustements sont
nécessaires. Ils concernent:
n la réserve de capitalisation
n les plus-values latentes
n la provision globale de gestion et
autres provisions complémentaires
De
manière générale il faut toujours veiller à ne prendre en compte ces
ajustements qu'une seule fois, soit au sein de l'ANR soit dans le calcul de la
valeur du portefeuille, mais en aucun cas au sein des deux.
1 Actif net comptable
Le point de
départ au calcul de l’ANR se trouve au passif du bilan sous la rubrique
“1. Capitaux propres“, en règle générale composée des éléments suivants
n Capital social
n Réserve de capitalisation
n Report à nouveau
n Résultat de l’exercice
n Diverses provisions (réserve des
plus-values nettes à long terme …)
On distingue
les capitaux apportés qui seront repris à leur valeur d’apport, des capitaux
propres constitués au fil des ans à partir des résultats de la société. Ceux-ci
sont souvent inscrits à des postes de réserves et ont subit une fiscalité
spécifique au moment de leur constitution ; la reprise s’effectuera alors
très certainement avec paiement d’un impôt. Si tel est le cas, l’impôt est
déduit de la valeur affichée au bilan pour le calcul de l’ANR.
2 Réserve de capitalisation
Son objet
est de mettre en réserve les plus-values réalisées sur les titres obligataires
(comptabilisés en R332-19, hors amortissement et coupon couru) et d'être
liquidée en cas de moins-values de cession.
D'un point
de vue comptable, la réserve de capitalisation se trouve dans les fonds propres
(Classe 10, capital et réserves); cette considération est renforcée par la
position récente du Conseil National de la Comptabilité dans son règlement relatif
aux comptes consolidés des compagnies d'assurance (décembre 2000): la réserve
de capitalisation "fait partie des
capitaux propres de l’entreprise acquise car elle ne constitue pas un passif
identifiable", sous réserve des dispositions relatives aux impôts et
aux participations différés.
Le fait
qu'elle soit néanmoins une provision technique, et son mode de constitution
font qu'elle est "immobilisée" dans la société d'assurance, et ne
peut donc être mise à disposition des actionnaires. Cependant les intérêts
qu'elle génère appartiennent à ces derniers (Article A331-7 du Code des
assurances), sauf disposition contractuelle contraire.
Ils sont
imposés au taux de l’IS au moment de leur distribution et ils ont alors la
valeur suivante:
où Capik
correspond à la réserve de capitalisation en fin d'année k (l'année 0 étant
l'année d’évaluation), ik est
le rendement financier des actifs en regard des fonds propres, IS le taux de
l’impôt sur les bénéfices et RDR le taux d’escompte.
La
réserve de capitalisation dispense également l'actionnaire d'injecter et d'immobiliser
du capital. Elle a par conséquent également de la valeur en tant que réducteur
du besoin en marge; cet aspect est détaillé au niveau du coût de la marge de
solvabilité. Au final ceci permet de considérer que 100% de la réserve de
capitalisation peut être ajoutée à l'ANR (usage courant dans la mesure où
l'échéance de la projection est lointaine), à condition de ne pas en tenir
compte dans la diminution du coût de la marge au niveau de la valeur du
portefeuille.
3 Plus-values latentes
L'embedded
value intègre la part des plus-values latentes revenant aux actionnaires. Cette
part varie suivant la méthodologie appliquée dans le calcul de la valeur du
portefeuille; en effet pour cette dernière, plusieurs approches sont possibles:
1.
Celle
consistant à considérer que les plus-values latentes sont réalisées pour
financer un taux de rendement comptable supérieur au taux de réinvestissement
n pour les titres assimilés amortissables
cette approche correspond à l'hypothèse que les titres sont détenus jusqu'à
leur échéance avec réinvestissement des coupons et remboursements en actifs de
même nature au taux de rendement du marché
n pour les autres actifs, les plus-values
latentes sont réalisées et réinvesties en fonction d'un modèle actif-passif
sans production future.
Avec
cette approche, la valeur attribuée aux plus-values latentes est
automatiquement incluse dans la valeur du portefeuille.
2.
Celle
supposant que tous les actifs en portefeuille sont réalisés et réinvestis en
actifs de même nature aux conditions du marché à la date d'évaluation: actifs
obligataires pour les obligations et titres assimilés amortissables
(comptabilisés suivant l'article R332-19 du Code des assurances) et actions,
immobilier et trésorerie pour les autres actifs (comptabilisés suivant
l'article R332-20 du Code des assurances).
Avec
cette approche, la part des plus-values latentes revenant aux actionnaires est
habituellement incluse dans l'actif net réévalué.
3.
D'autres
reprenant les deux principes précédents avec des variations par classe
d'actifs: par exemple, on pourrait inclure les rendements comptables des actifs
R332-19 dans les modèles de projection et, dans l'ANR, que la part des
plus-values latentes sur actions/OPCVM/immobilier revenant aux actionnaires.
Ces
approches ne donneront pas lieu à une embedded value identique pour les raisons
suivantes:
n L'inclusion du dégagement de plus-values
latentes dans les modèles augmentera la participation aux bénéfices incorporée
dans les provisions mathématiques projetées. Cette participation aux bénéfices générera
ensuite des marges financières pour l'actionnaire et donc des résultats plus
élevés. En revanche, ces résultats sont habituellement actualisés avec un taux
qui est supérieur au taux de rendement de l'actif, ce qui diminue la valeur des
résultats.
n La deuxième méthode correspond à
l'exclusion des plus-values latentes des modèles et une distribution immédiate
aux assurés et aux actionnaires.
D'un
point de vue théorique la première méthode correspond le mieux à la réalité de
l'activité, et c'est donc celle qu'il faut retenir de préférence. En pratique,
les deux méthodes peuvent donner des résultats similaires car l'augmentation
des résultats futurs qui provient de la projection de la réalisation des
plus-values latentes est compensée par l'effet de l'actualisation des résultats
avec un taux qui excède le rendement de l'actif.
Les
plus-values attribuées aux fonds propres devraient toujours être allouées à
L'ANR. Il peut être nécessaire de les évaluer dans le total des plus-values, en
considérant par exemple la part des provisions mathématiques des contrats
participants par rapport au reste des actifs hors contrats en unités de compte.
Les
plus-values latentes sur les actifs représentant les contrats en euros sont
partagées entre les assurés et la société en fonction des contraintes
suivantes:
n les règles de participation stipulées
dans les contrats
n la politique et la stratégie de la
compagnie en matière de participation aux bénéfices.
Cependant
le Code des Assurances précise (A331-6 et suivants) qu'une société d’assurance
doit distribuer aux assurés 85% de ses produits financiers évalués sur la base
des rendements de l'ensemble des actifs (plus 10% des résultats techniques
positifs, ou moins 100% des résultats techniques négatifs). Il est donc
nécessaire de projeter le montant de plus-values pouvant être dégagé année
après année en suivant la règle de participation minimale. Toute politique de
participation aux bénéfices intégrée dans l'embedded value doit respecter cette
contrainte.
Par
le passé, certaines sociétés ont attribué plus que 15% des plus-values
réalisées aux actionnaires, notamment parce qu'elles avaient des résultats
techniques négatifs importants sur les affaires nouvelles. Dans le calcul d'une
embedded value, on ne devrait pas tenir compte de la possibilité d'augmenter la
part des plus-values latentes revenant aux actionnaires qui dépend de la
souscription d'affaires nouvelles. Dans la mesure où une société arrive à
financer une partie de ses pertes techniques dans l'année, en augmentant la part
des plus-values réalisées revenant aux actionnaires, ce financement doit être
reflété dans la détermination de la valeur ajoutée par les affaires nouvelles.
4 Moins-values latentes
Dans le cas
d'une moins value latente sur les actifs comptabilisés en R332-20, il y a en
règle générale, sauf ajournement autorisé par la Commission de Contrôle des
Assurances, passage d'une Provision pour Risque d'Exigibilité
("PRE"). Si ce n'est pas le cas (dérogation de la CCA, évaluation en
cours d'année avec calcul de la PRE en fin d'année uniquement), la moins-value
doit être cependant prise en compte dans le calcul de l'ANR: les modalités sont
identiques à celles concernant les plus-values latentes. Cependant, il peut
s'avérer plus difficile de justifier un partage des moins-values latentes avec
les assurés dans la mesure où les conditions compétitives ne permettront pas à
une compagnie de baisser les taux crédités pour mettre ce partage en œuvre.
En ce qui
concerne les provisions pour dépréciation et pour dépréciation à caractère
durable, aucun retraitement n'est nécessaire dans la mesure où elles ont été
passées.
5 Provision pour participation aux excédents ("PPE")
La PPE a très peu de valeur directe pour les actionnaires, le Code des
assurances exige qu'elle soit incorporée dans les provisions mathématiques dans
les 8 ans qui suivent sa constitution. En revanche les revenus financiers sur
la PPE peuvent générer une marge financière pour les actionnaires qui peut être
projetée et incorporée dans l'embedded value.
Comme pour les plus-values réalisées, les actionnaires peuvent
effectivement profiter de la PPE en l'utilisant pour financer des pertes
techniques sur les affaires nouvelles. Si les actionnaires parviennent à
réduire leur perte de première année sur les affaires nouvelles par ce
mécanisme, l'impact doit être reflété dans le calcul de la valeur ajoutée par
les affaires nouvelles et non dans l'embedded value.
Evidemment, il faut s'assurer que les contraintes contractuelles sont
respectées.
6 Provision globale de gestion
Cette
provision a un caractère prudent. Elle correspond à la mise en réserve des
frais futurs qui ne sont pas contrebalancés par des prélèvements sur les
contrats. Elle est constituée en déduction des résultats imposables passés, et
sera libérée au fur et à mesure des dépenses de gestion.
Lorsque les
frais de gestion sont entièrement pris en compte dans l'évaluation des
bénéfices futurs, cette provision peut être directement ajoutée à l'actif net à
la condition que son dégagement ne soit pas lui aussi déjà considéré dans le
calcul de la valeur du portefeuille. Ce choix peut être retenu plutôt
qu'effectivement la dégager au fil des ans et en tenir compte dans la valeur du
portefeuille, surtout si elle est de faible montant.
Sinon, la
provision doit donc être valorisée comme la valeur actuelle des dégagements
futurs nets d’impôt. A défaut d’un modèle précis, on peut étaler les
dégagements de façon linéaire sur une période adéquate, sans oublier de
comptabiliser également des intérêts sur la provision de l’année.
7 Résultat de l’exercice
En règle
générale, l’assemblée générale de la compagnie ne confirme que vers les mois de
mai ou juin le montant des dividendes à distribuer et les comptes sont établis
avant cette décision (bilan en instance
d’affectation).
S'il est
possible de connaître le montant de dividendes qui sera distribué, celui-ci
devra être déduit de l’ANR. Dans tous les cas, il est utile de préciser si
l’ANR comprend ou non les dividendes distribués au titre du dernier exercice.
8 Réserves et provisions diverses
Il est
nécessaire de vérifier que les diverses réserves et provisions constitutives
des fonds propres ont une valeur pour l’actionnaire. Les réserves le plus
souvent rencontrées sont :
8.1 La réserve spéciale des plus-values à long terme
Sous
certaines conditions, les plus values à long terme réalisées au cours d’un
exercice peuvent être dotées à la réserve correspondante. Dans ce cas, les plus
values sont mises en réserve après déduction d’un impôt réduit. Lors de la
reprise ou de prélèvements sur cette réserve, la société doit donc acquitter
l’impôt complémentaire. Celui-ci est égal à l’impôt qui frappe les bénéfices
d’exploitation de l’exercice au cours duquel le prélèvement est opéré, diminué
de l’impôt déjà payé.
Le montant
de cette réserve est à inclure dans la valorisation de l'ANR à condition
toutefois de corriger la situation nette d'un montant égal à l'impôt restant à
payer, calculé sur la base du taux actuel d'imposition diminué du taux
d'imposition déjà supporté. Ce taux d’impôt réduit a évolué au cours du temps,
et il faut donc connaître les taux d’imposition sur la base desquels la réserve
a été constituée afin de pouvoir calculer le complément à déduire dans le cadre
de l’évaluation.
Cette
réserve peut également servir à couvrir une partie du besoin en marge de
solvabilité, et possède également une valeur à ce titre (cf. réserve de
capitalisation).
8.2 Les provisions mathématiques complémentaires
Celles-ci
peuvent avoir été constituées sur demande de la Commission de Contrôle des
Assurances suite à des non respects de la réglementation en vigueur à la date
de commercialisation (le plus souvent les taux minima garantis). Elles ont donc
été constituées en déduction des résultats imposables passés.
Si l’actif
mis en représentation des contrats concernés est en adéquation (taux, duration)
avec les engagements, et qu’on peut donc raisonnablement penser que les
provisions ont un caractère prudentiel plutôt que nécessaire, ces dernières
doivent être valorisées pour leur montant net d’impôt. Il est toujours
préférable d’étaler les dégagements dans le temps si cela correspond à la
réalité, sans oublier les intérêts sur la provision de l’année.
8.3 Amortissement de goodwill
Lorsque la
société supporte chaque année une charge d'amortissement faisant suite à l'acquisition
de participations, le montant restant à amortir est à déduire de l'ANR.
8.4 Frais d'acquisition reportés
Dans le cas
où la société fait apparaître au bilan des frais d'acquisition reportés, et si
ces derniers ne font pas l'objet d'un amortissement dans les projections
utilisées pour calculer la valeur de portefeuille, ces actifs devraient être
retirés de l'ANR.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire